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Chargé de retrouver les personnes concernées par une procédure judiciaire, le curateur est une institution devenue obsolète selon les avocats sondés par Médias24. Abandonnée dans la dernière version de l’avant-projet du code de procédure civile, elle pourra être remplacée par une base de données de CNIE. Les notifications seront alors envoyées à l’adresse figurant sur la CNIE
Décrite comme étant une « source de corruption » ou encore un « cimetière de notifications », l’institution du curateur est considérée comme « obsolète » par des avocats qui se réjouissent de sa suppression dans la dernière version de l’avant-projet du code de procédure civile.
Celle-ci a été soumise à l’Association des barreaux du Maroc (ABAM) qui devrait transmettre son avis au ministère de la Justice, d’ici le 27 janvier. Parmi ses nouveautés majeures : l’abandon de l’institution du curateur. Historiquement mise en place pour garantir la protection des citoyens, elle devient, aujourd’hui, « un point noir de la procédure de notification », selon un avocat du barreau d’Agadir, joint par nos soins.
« De nombreuses législations comparées ont abandonné cette institution »
« Si l’huissier de justice ne trouve pas le poursuivi ou la personne concernée par une procédure judiciaire, soit parce que son local est clos ou parce qu’elle a déménagé, etc. le juge est obligé de passer par plusieurs étapes. Il s’agit d’abord d’une nouvelle tentative de notification par huissier, puis de l’envoi d’une lettre recommandée, avant de transmettre le dossier à un curateur », explique cet avocat qui requiert l’anonymat.
« Le curateur est un agent du greffe, désigné par le chef du greffe pour aller à la recherche de la personne concernée. À l’époque où les villes étaient beaucoup moins peuplées, les curateurs arrivaient à retrouver les personnes recherchées, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. D’ailleurs de nombreuses législations ont abandonné cette institution. Il s’agit du Sénégal, de l’Algérie, de la Tunisie, du Liban, de la Suisse, du Canada, de la France et de la Jordanie. Nous sommes donc très en retard. »
En outre, pour pouvoir retrouver les personnes concernées, le curateur doit « demander par écrit l’aide du ministère public ». Or, même si cela fait partie des ses prérogatives, « le ministère public est débordé ».
« Une étape qui ne fait que retarder la procédure judiciaire »
Ainsi, « les audiences sont continuellement reportées, jusqu’à réception de la réponse du curateur, sachant qu’aucun délai légal n’est fixé pour permettre au tribunal de passer au jugement à défaut d’une réponse », ajoute l’avocat qui insiste, par ailleurs, sur l’absence de trace informatique dans le cadre de cette procédure.
« Toute cette gestion n’est pas informatisée. On peut savoir si un curateur a été désigné, mais on ne peut pas savoir ce qui se passe par la suite, s’il a pris l’attache du ministère public, et si ce dernier a répondu. »
Également contacté par Médias 24, Me Mourad Elajouti estime que cette institution « ne marche pas ». Selon lui, il s’agit « d’un cimetière de notifications », puisque le curateur « retient les notifications pendant plusieurs mois, avant d’annoncer que la personne concernée n’a pas été retrouvée, et que la procédure judiciaire peut continuer ».
« C’est une étape qui ne fait que retarder la procédure judiciaire. On se retrouve avec des dossiers qui traînent au tribunal pendant un anpour défaut de notification. Parfois, la procédure de notification prend plus de temps que le dossier lui-même », souligne Me Elajouti.
C’est ce que nous confirme notre interlocuteur d’Agadir. Selon lui, certains dossiers sont « bloqués depuis des années à l’étape du curateur ».
Recourir à une base de données de CNIE
Les deux avocats s’accordent également sur une alternative plus efficace à mettre en place et qui, comme le souligne cet avocat d’Agadir, « ne repose pas sur le fait de donner à un fonctionnaire, sans ressources matérielles, techniques, technologiques ou humaines, la mission de retrouver un individu ».
Cette alternative a été introduite dans la dernière version de l’avant-projet du code de procédure civile : celle de recourir à une base de données de CNIE, dont l’organisation sera encadrée par voie réglementaire.
Pour Me Elajouti, « il faudrait directement recourir à la base de données des CNIE pour notifier les personnes poursuivies ou concernées par une procédure judiciaire, à l’adresse mentionnée au niveau de la CNIE. Ainsi, que la personne l’ait reçue ou non, la notification est valide et la procédure suit son cours ».
« C’est la solution la plus pratique pour mettre fin à cette problématique relative aux notifications, car généralement l’adresse qui figure sur la CNIE est soit l’adresse de résidence de la personne concernée, soit celle de sa famille », ajoute Me Elajouti.
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Source : Media24