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Collecte d’informations des clients, devoir accru de vigilance et risques de sanctions pécuniaires… Une note du ministère de la Justice détermine les responsabilités des professions judiciaires dans la lutte contre le blanchiment d’argent.
Avocats, notaires et adouls. Ces trois professions juridiques sont appelées à s’impliquer davantage dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Datée du 20 janvier, une note du ministère de la Justice vient étayer leurs obligations en la matière. Et elles sont beaucoup plus contraignantes depuis la récente modification de la loi anti-blanchiment.
Le document, dont Médias24 détient copie, a été adressé simultanément à l’Association des barreaux du Maroc, au Conseil national des notaires et à l’Ordre national des adouls. Ces trois entités sont les interlocuteurs officiels du département dirigé par Abdellatif Ouahbi.
Les avocats, les notaires et adouls font partie des personnes assujetties à la loi contre le blanchiment de capitaux. Ce texte leur impose des réflexes à adopter, précisément lorsqu’ils préparent ou réalisent, pour le compte de leurs clients, des opérations relatives aux activités suivantes :
– l’achat ou la vente de biens immobiliers, d’actifs commerciaux ou de l’un de leurs éléments ;
– la gestion de fonds, de titres, de comptes bancaires, de dépôts ou d’autres actifs appartenant au client ;
– l’organisation et l’évaluation des parts nécessaires à la constitution des capitaux des sociétés ou à leur gestion ou exploitation ;
– la constitution, la gestion ou l’exploitation des personnes morales ;
– la vente ou l’achat des parts ou d’actions des sociétés commerciales.
Devoir de vigilance
Le trio concerné est ainsi soumis à un « devoir de vigilance » qui passe, notamment, par la collecte, la préservation et l’actualisation de toutes les données permettant d’identifier leurs clients habituels ou occasionnels, ainsi que toute autre partie.
La même obligation s’étend aux « bénéficiaires effectifs ». Autrement dit – et entre autres – aux « personnes physiques qui possèdent ou contrôlent, en dernier ressort le client ou la personne physique pour le compte duquel les opérations sont effectuées ». Cette disposition sera facilitée par la création annoncée d’un registre national listant ces personnes.
Des formulaires doivent être créés, selon qu’il s’agisse d’une personne physique (nom, prénom, CNIE, adresse détaillée, téléphone, e-mail, etc.) ou morale (dénomination, forme sociale, activité, adresse du siège, n° d’immatriculation au registre de commerce, identité des dirigeants, etc.). Ces informations doivent être vérifiées via des documents officiels.
Les mesures de vigilance sous-tendent la mise en place, au sein des cabinets, de structure de gestion et d’évaluation des risques. Elles impliquent également des efforts d’investigation pour chaque opération. À titre d’exemple, les personnes assujetties doivent s’enquérir de la nature de la relation d’affaires, s’assurer de l’origine et de la destination des fonds, prendre les mesures et les dispositions appropriées pour déterminer et vérifier l’identité du bénéficiaire effectif, afin de s’assurer de bien le connaître et de comprendre la structure de la propriété des personnes morales, ainsi que les contrôles.
Risque de sanctions pécuniaires
Une information inexacte ou indisponible, une identité manifestement fictive ou une opération douteuse… À la moindre ambiguïté, le professionnel doit s’abstenir d’établir un lien de travail avec le client, ou le rompre s’il est déjà entamé, et refuser toute opération à cet effet. Doit s’ensuivre une « déclaration de soupçon » auprès de l’Autorité nationale du renseignement financier. Le secret professionnel n’est pas opposable à cette institution.
L’inobservation de ces obligations est assortie de sanctions. L’avocat, notaire ou adoul qui manque à son devoir encourt une sanction pécuniaire pouvant atteindre 1 million de dirhams. Sans préjudice de sanctions pénales plus graves.
La sanction pécuniaire est, le cas échéant, prononcée par le ministère de la Justice. Ce dernier assure les missions de supervision et de contrôle sur ces trois professions. Ces décisions sont susceptibles de recours devant le tribunal administratif.
Au département de Abdellatif Ouahbi, un comité anti-blanchiment de capitaux a été créé dans ce sens. Rattachée à la direction des affaires pénales, cette entité va opérer de deux manières : un contrôle « à distance » à travers un formulaire électronique que doivent remplir les professionnels assujettis, ou encore des missions de contrôle inopiné.
Source: Médias24